Communiquer comme un droit
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Communiquer comme un droit

Mathilde Kpalla

Il y a plusieurs décennies, Jean d’Arcy a promu sans relâche le concept de droit à la communication dans les instances internationales. Depuis, de sérieux débats continuent sur la reconnaissance ou non de ces droits et surtout l’appréhension de ceux-ci. Comprenons-nous vraiment ce que c’est qu’est un droit à la communication ou les droits à la communication ?

En effet, selon le Manuel d’évaluation des droits à la communication produit dans le cadre de la campagne CRIS :

« Les termes «droit à la communication» et «droits de la communication» sont étroitement liés mais ne sont pas synonymes, tant dans leur histoire que dans leur usage. Le premier est plutôt associé au débat sur le NOMIC et suppose la nécessité de la reconnaissance juridique d’un tel droit, comme cadre général d’une mise en œuvre plus efficace. Il relève également d’un sens intuitif en tant que droit humain fondamental. Le deuxième insiste davantage sur le fait qu’une série de droits internationaux qui visent à défendre la communication existe déjà, mais que bon nombre d’entre eux sont souvent bafoués et exigent une mobilisation et une affirmation actives. Les deux ne se contredisent pas … »

Le Droit à la Communication se fonde sur l’histoire, puisqu’il a toujours existé un lien entre le pouvoir et la domination de la communication, et qu’il a été impératif d’établir des droits face au potentiel diktat que cela suppose. En 1948, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme a consacré, dans son article 19, le Droit à l’Information, qui comprend des droits individuels, comme d’informer et d’être informé, la liberté d’opinion, la protection de la vie privée et le libre accès à l’information, ainsi que des droits institutionnels pour les médias, les professionnels et des droits collectifs.

Il faut avouer que concilier droit et communication est un exercice difficile étant donné que ces deux concepts sont évolutifs. Le concept même de communication est dynamique, pas statique dans le temps, ni dans l’espace. En effet la communication définit un individu, son être, son essence, sa culture, sa différence. Parler de doit à la communication suggère donc « être » pour un individu sans aucune pression ni marginalisation. La communication est au centre même du fonctionnement de nos sociétés. Elle permet d’avoir une certaine organisation sociale. Il existe d’importantes différences entre les pays, les cultures et les systèmes idéologiques sur le problème des droits de l’homme.

Les droits à la communication tentent ainsi d’éliminer les différents obstacles sociaux, historiques, économiques et psychologiques à la communication, de favoriser un climat de respect mutuel et de renforcer les capacités de tous en matière de communication et dialogue. Ils sont donc fondamentaux.

Le mouvement a fait son chemin depuis que Jean d’Arcy en 1969, a lancé le concept du droit à la communication et qu’il précisa dix ans plus tard en ces termes :

« Nous voyons aujourd›hui que ce droit embrasse toutes les libertés, mais qu›en outre il apporte, aussi bien aux individus qu›aux sociétés, les notions d›accès et de participation à l›information et de courant bilatéral de l›information, toutes notions nécessaires, comme nous le comprenons bien maintenant, au développement harmonieux de l›homme et de l›humanité. »

Des mouvements sociaux, des organisations et aussi des citoyens s’y sont investis. Avec des résultats remarquables en termes de sensibilisation.

Mais alors si cela touche à nos droits fondamentaux et inaliénables pourquoi y’a t’il tant de mal à cerner ce droit ou ces droits ? Pourquoi y’a-t-il tant de mal à comprendre le concept de « droit à la communication » ou droits à la communication ».

Alors à quoi doit-on se référer lorsque l’on parle de « droit à la communication » ? Faut-il changer de terminologie ? Et que devrait-on alors dire ? « Démocratisation de la communication ». Puisque c’est de cela qu’il s’agit en fait.

Car plus que jamais, il est essentiel de continuer la lutte face à la menace de contrôle qui pèse. Et surtout, de tout temps, cette époque est celle où la société est le plus confrontée aux défis liés à la communication. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication, les réseaux sociaux, l’intelligence artificielle. Autant de vastes champs qui requièrent réflexions et solutions.

Mais aussi au-delà de tout, le droit ne règle pas tout. Notre prise de conscience en tant individu, en tant que communauté, notre utilisation responsable des outils de communication et surtout la décision d’être notre propre modérateur seront les meilleurs garde fous en ce moment où on a l’impression qu’au-delà de tout contrôle, de tout droit « l’être » est numériquement instrumentalisé.

Alors droit à la communication ou « droits à la communication », « démocratisation de la communication », la communication doit pouvoir permettre à l’individu « d’être », dans le respect mutuel des libertés fondamentales de tous. Communiquer comme un droit, dans le respect des droits d’autrui. Aucune autre expression ne peut remplacer le « droit à la communication » ou les « droits à la communication ».

KPALLA Mathilde est une journaliste togolaise engagée dans la communication pour le changement des comportements. Directrice de programmes d’une radio confessionnelle. Membre de le WACC, actuellement Présidente de WACC Afrique et Vice-Présidente WACC Global.

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